Mes grand-parents sont partis et j'ai la sensation de pouvoir enfin percer certains mystères de leurs existences. Je me suis plongée dans les quelques lettres qu'ils ont laissé. Je les ai lues et relues, vingt fois pour certaines. J'ai été submergée par l'émotion. C'était réél, c'était là, entre mes doigts. Des lettres de 1955 ! Ils laissent derrière eux une grande maison remplie de souvenirs. J'y ai découvert tout un univers et tout un quotidien. J'ai mieux compris. J'ai mieux aimé. Et puis il y eu les armoires à trier et les bureaux à vider. Toute une vie se trouvait là. Les culottes d'enfants et les pattes d'éléphants, les linges brodés et les robes cousues à la main, le linge de nourisson, les petits chaussons, les corsages et des tricots à gogo. Du petit linge rangé avec soin en petits paquets bien conservés. Et puis c'était tout un quotidien en petits papiers. Dans mes mains un ticket de caisse de 1982, la lettre d'un ami proche datant de 1959, des carnets de note de 1982, des petits mots gribouillés, des factures, une liste de cadeaux de noël datant de 1972, des consignes pour la réalisation d'une maille de tricot compliquée. C'était là, c'était toute une vie entre mes doigts. J'apprend à les connaître à travers ce qu'il laissent de 50 ans d'existance dans cette maison. Je n'aurai rien pu apprendre de leur bouche à eux, ils étaient trop vieux, trop mystèrieux, c'était trop tard. Je trie et découvre toute une vie de livres lus et des tricots entammés dans tous les coins de la maison. Mes grand-parents sont partis et nous, nous nous retrouvons. Certains liens, usés par le temps, se sont renoué doucement, dans le souvenir d'une enfance partagée. Entre deux rangements, entre la chambre du bas et le salon du haut les souvenirs ont ressurgis. Mes oncles, ma tante, peu à peu m'ont fait le cadeau de les dévoiler, parfois avec pudeur et retenue, parfois avec soulagement et émotion. J'ai écouté la si belle complicité qui les a uni, la fraternité et les cachettes dans le grenier lorsque l'un d'eux allait se faire gronder, le relais pour lui apporter à manger en douce. Les bêtises et la vie au grand air, la vie dans les rues du village et les vacances en Bretagne. Et puis, j'ai écouté ma tante confier ses peines d'enfant noyée par le chagrin de sa mère et du souvenir incessant, inlassable de la mort. L'amertume et le tristesse. J'ai aimé écouter. J'ai aimé comprendre et apprendre encore de cette famille et d'une partie de ma propre histoire.